Jeudi 18 mars à 14 heures, le lycée français privé Saint Michel a organisé une cérémonie afin de commémorer la victoire et les martyrs de la bataille de Çanakkale. Les élèves de 12ème, qui ont repris les cours en présentiel, étaient présent(e)s tandis que nos autres élèves ont participé en ligne.
La cérémonie a commencé par une minute de silence pour rendre hommage aux martyrs qui ont donné leur vie pour la patrie. Elle s’est ensuite poursuivie avec l’hymne national turc.
Nos élèves de 12ème ont lu des lettres des soldats tombés au combat afin d’incarner les chiffres qu’ils rencontrent habituellement dans les livres d’histoire. Autant de récits qui permettent d’éclairer ce qui s’est passé pendant la guerre et prendre la mesure de la dimension humaine et dramatique de cet événement historique.
Les témoignages avaient de quoi nous briser le cœur. En voici un extrait :
La semaine dernière, lorsqu’un cessez-le-feu mutuel a été déclaré pour enterrer les morts, nous avons vu les Turcs de près, en chair et en os, pour la première fois. Ils n’avaient rien des monstres qu’on nous avait décrit. C’étaient eux aussi de jeunes hommes, plein d’inquiétude et de chagrin dans leur regard. Eux aussi avaient laissé des familles derrière eux, des parents âgés, des épouses, peut-être des amantes, qui les attendaient. Ils souffrent également lorsqu’ils sont blessés, abandonnent leurs rêves de jeunesse et pour aller mourir sur le front. Les Turcs aussi étaient des êtres humains.
J’ai proposé de la viande en conserve aux deux Turcs qui m’avaient donné du lait, mais ils n’ont pas accepté. J’ai pourtant dit que c’était du bœuf, mais ils n’y croyaient pas. En fait, ils ne comprenaient sans doute pas. J’ai ensuite mimer un bœuf, en simulant une corne sur ma tête avec mes mains et en mugissant comme le font les bestiaux. Ils ont tellement ri. J’ai ri aussi. Nous étions pourtant sur le champ de bataille, entourés de cadavres de soldats. Nous étions ennemis hier encore mais aujourd’hui, nous nous taquinions les uns les autres. Un des Turcs qui m’avait tendu le lait m’a demandé « sen no British » avec surprise. J’ai dit » Non, je ne suis pas britannique ». Puis il a tendu la main: “je suis turc”. J’ai attrapé la main tendue vers moi. Là, sur cette colline où se sont déroulées les batailles les plus sanglantes de Gallipoli, nous nous sommes serrés la main. Comment pourrais-je être l’ennemi de cet homme désormais? Pourquoi l’étais-je devenu ? « Mon ennemi, à ce moment-là, l’ami était turc. Je refuse de mourir dans cette guerre. Ce n’est pas ma guerre. Cependant, j’ai même perdu l’envie de vivre.
La cérémonie s’est achevée par la lecture du poème de Nazim Hikmet « Ne laissez pas les nuages tuer l’homme ». En souhaitant qu’il n’y ait plus jamais de guerres.